Carlo Mainetti - Dermatologica Helvetica 2/23
Dans les précédents numéros nous avons abordé le problème des tarifs médicaux ambulatoires par des interviews à Madame B. Mutter (DH 2022/4) et au Docteur Ph. Spring (DH 2022/6). Ce sujet est central pour la politique nationale de santé publique.
2023: année électorale pour les deux chambres parlementaires de la Suisse
Vous ne trouverez jamais sur le programme de la campagne électorale des candidats soit de droite que de gauche en cours pour l’élection de cet automne à Berne cette affirmation: «Nous allons rémunérer les médecins avec des tarifs ambulatoires équitables, pour une médecine de meilleure qualité!». Bien que certains d’entre eux se rendent compte que la qualité, aussi en médecine, a un prix, personne ne mettra cet argument dans sa campagne: ce serait un «suicide électoral»! En effet, malgré le vent de guerre provenant de l’est, qui hélas nous trouble depuis plus d’un an, parmi les soucis plus importantes pour les citoyennes et citoyens suisses, les coûts des primes d’assurance maladie restent sur le podium, et ceci depuis des années. Bien sûr, lors de la campagne électorale, la majorité des candidats rassureront les électeurs sur les manoeuvres de contrôle des coûts des primes, en garantissant la qualité des soins: bref, comme toujours, ils tenteront de «vendre une Rolls-Royce, en payant le prix d’une Fiat 500!». Mais nous savons, et au fond de leur coeur la plupart des politiciens le savent probablement aussi, que la situation n’est plus soutenable et que la rémunération actuelle du tarif date des années ’90.
D’autre part les assureurs maladie commencent à se rendre compte que la hausse des primes n’est que le reflet de la croissance des coûts et que leur réduction serait une utopie. La population vieillit et reste en bonne santé plus longtemps grâce aux progrès de la médecine. Selon Stefan Schena, le chef de l’assurance maladie ÖKK, lors d’une interview au journal Schweiz am Wochenende de février 2023 disait: «L’objectif devrait rester de faire en sorte que les coûts de la santé n’augmentent pas plus que la croissance économique.» Il faut en tenir compte dans le tableau d’ensemble.
Face à cette situation, comment pouvons-nous agir pour améliorer nos tarifs ambulatoires et faire en sorte que le travail de plus d’une décennie pour moderniser TarMed soit payant? Il n’y a qu’une seule réponse: négocier avec tous les partenaires!
La dernière étape du parcours pour créer un nouveau tarif a commencé en juillet 2019, lorsque la FMH et curafutura ont soumis pour la première fois le TARDOC au Conseil fédéral (CF): Rejeté! En mars 2021 avec l’adhésion de SWICA, la version TARDOC 1.2 est soumise: le CF informe les partenaires non inclus et propose d’autres modifications. En décembre 2021, nouvelle soumission de la version TARDOC 1.3, réunissant FMH et la majorité des assureurs (curafutura, SWICA et CTM): en juin 2022, le CF la rejette à nouveau et formule deux conditions d’acceptation, dont un est crucial: «… les partenaires tarifaires n’ont pas réussi à former une alliance plus large, comme le demandait le Conseil fédéral dans sa lettre du 30 juin 2021. En particulier, l’absence de participation de H+…, mais aussi celle de santésuisse …».
Comment faire déboucher la situation?
Enfin le 15 novembre 2022, les organisations partenaires FMH, H+, santésuisse, curafutura et la Commission des tarifs médicaux LAA (CTM) ont formé une société dont la raison sociale est «Organisation Tarifs Médicaux Ambulatoires SA» (OTMA).
Cette organisation devra travailler bien et vite, car si elle ne produit pas un tarif avec les justes conditions d’ici fin 2023, le CF, comme il l’avait fait en mars 2017, «attaquera» le Tar- Med, désormais dépassé.
Une des étapes clés de la création de cette société (OTMA) a été la reconnaissance mutuelle entre les partenaires des deux types de régime tarifaire: TARDOC et forfaits ambulatoires. Les principes supérieurs de tarification vont régler l’interaction et la coordination entre les forfaits ambulatoires et le TARDOC (par exemple, quand quelle prestation médicale est indemnisée par le TARDOC ou par les forfaits ambulatoires).
Mais où en est le TARDOC? Le CF, dans sa décision du 3 juin 2022, a écrit qu’il serait applicable à la seule exception de la neutralité des coûts. Les experts du tarif ont formulé l’objectif de corriger cet aspect pour formuler un TARDOC 1.3.1 d’ici juin 2023.
Et où en sommes-nous avec les forfaits ambulatoires? Toutes les disciplines seront impliquées pour les formuler d’ici juin 2023. Afin de fournir un know-how aux sociétés de discipline médicale et de les intégrer à l’avenir dans les structures de l’OTMA SA, la Taskforce Forfaits Ambulatoires (TFA) est créée au sein de la FMH.
Le tableau de marche prévoit en automne 2023 l’approbation interne des deux tarifs par les partenaires tarifaires. A l’avenir, le tarif forfaitaire et le TARDOC coexisteront. Le TARDOC devrait pouvoir être introduit définitivement en 2025.
Dans le prochain numéro de Dermatologica Helvetica, nous interrogerons notre expert en tarifs pour en savoir plus sur l’OTMA et la TFA et sur les prédictions tarifaires futures.
Affaire à suivre …